Histoire naturelle Des classifications en histoire naturelle
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DES CLASSIFICATIONS EN HISTOIRE NATURELLE. Ce titre, un peu sévère, pourrait faire craindre une page bien peu agréable, et la plupart des lecteurs s'empresseraient de passer cet article si je ne les rassurais un peu à l'avance sur l'objet de mon travail. Je ne veux pas faire une liste dénuée d'intérêt et d'utilité de noms discutés encore maintenant par les naturalistes, mais présenter seulement, dans un tableau aussi court et aussi exact que possible, l'historique des classifications auxquelles se rattachent de grands noms, et faire ressortir l'utilité qui accompagne ce chapitre nécessaire de l'histoire naturelle. Poursuivre l'ordre adopté généralement dans les cours, je commencerai par la zoologie. I. — Classifications zoologiques. Les classifications zoologiques, comme du reste toutes les classifications en général, sont de deux espèces : les unes arbitraires sont dites artificielles, les secondes sont naturelles. Dans les premières, on fonde les divisions sur les modifications que présentent certaines parties du corps choisies arbitrairement; dans les secondes, on se base sur l'ensemble de l'organisation de chacun des animaux, et on les classe suivant les degrés de ressemblances et de différences qu'ils offrent entre eux. Les classifications artificielles sont, en général, d'une application facile, mais on est mené à comparer entre eux et à ranger dans la même catégorie des animaux qui n'ont souvent entre eux qu'une analogie apparente. En un mot, on connaît leurs noms, mais on n'apprend rien sur leur nature. — On peut dire, au contraire, que les classifications naturelles sont une espèce de tableau où sont rangés les caractères fournis par chaque animal, d'après leur degré d'importance. C'est ainsi qu'en connaissant la place qu'un animal occupe dans ce tableau, on connaît immédiatement les traits les plus remarquables de son organisation. La condition d'une classification naturelle est donc l'étude des caractères dominants qui distinguent les animaux entre eux. Il devient alors essentiel avant tout de connaître la structure, les fonctions et le mode de développement des animaux qu'on veut classer; c'est ici qu'interviennent la physiologie et l'anatomie. Il est, par exemple, naturel de penser que les parties les moins sujettes à varier dans les divers animaux sont celles qui ont le plus d'importance. La fixité est donc un caractère très important pour distinguer entre eux les groupes très nombreux des animaux; mais il peut arriver que l'importance d'un organe varie considérablement d'un groupe à un autre, et alors tel organe qui dominait dans un groupe se trouve au dernier rang dans un autre. On ne peut du reste connaître l'anatomie et la physiologie de tous les animaux, et les naturalistes ne sont pas toujours d'accord sur l'importance relative d'une modification de structure. Aussi n'existe-t-il pas de véritable classification naturelle et n'est-il pas étonnant de voir les auteurs différer dans le choix des méthodes. Pour la zoologie, c'est à Cuvier qu'on doit d'avoir pris les principes des méthodes naturelles pour la classification des animaux. Naturaliste aussi méthodique que Linné, génie plus étendu, mais moins majestueux que Buffon, Cuvier fut le premier naturaliste des temps modernes, quoiqu'il comptât parmi ses contemporains Lamarck, Blumenbach, Kielmeyer, Lacepède et de Humboldt. Une différence constante et capitale qu'il remarqua entre des os pétrifiés qu'on lui avait apportés des carrières de Montmartre et ceux des animaux récents de sa collection, fit une impression profonde dans son esprit. Il comprit aussitôt qu'il ne saurait pertinemment si les ossements fossiles proviennent d'espèces aujourd'hui perdues qu'autant qu'il connaîtrait les espèces encore existantes, et non seulement ces espèces, mais aussi leur structure exacte, leur anatomie. C'est alors qu'il s'empresse de publier son Tableau des animaux (1799) et ses Leçons d'anatomie comparée. Enfin, en 1817, apparaît le Règne animal. Il ne divisait pas encore les animaux en vertébrés, mollusques, articulés, radiaires; mais à l'occasion de chaque série d'organes, il passait en revue les différentes classes d'animaux. On remarque que, dans ses ouvrages, Cuvier insiste toujours sur les dissemblances des organes beaucoup plus que sur leurs similitudes. En résumé, son but était de distribuer naturellement les animaux comme Jussieu avait distribué les plantes, non sur des motifs frivoles et capricieux comme Linné, mais d'après l'état des organes les plus significatifs. En conséquence, il assigne le premier rang à ceux qui sont les plus constants dans la chaîne animale. La charpente osseuse tient la première place; les animaux sont vertébrés ou invertébrées. Les organes de la circulation viennent ensuite; l'animal respire par les poumons, ou par des branchies, ou par la peau, ou enfin par des trachées. En dernier lieu viennent les organes de nutrition, puis ceux de reproduction. Un exemple suffira à montrer l'enchaînement qui existe dans cette classification. Je suppose qu'on vous donne des dents et des pieds. Vous saurez immédiatement quel est le régime de l'animal, car des griffes et des dents propres à déchirer une proie indiquent un carnassier; un pied à sabots et des dents à couronne plate, un herbivore. De plus, cet animal rumine, et dés lors sa mâchoire devra se mouvoir horizontalement, ce qui montre suffisamment un condyle aplati. Telle est l'oeuvre de Cuvier. Je crois que c'est lui qui a la plus grande part dans les progrès que fit à cette époque l'histoire naturelle. Quant à Lacepède, ses travaux sont nombreux; mais sa classification des poissons en osseux et cartilagineux n'offre pas une rigueur suffisante. Nous allons nous occuper maintenant de la base de la classification adoptée aujourd'hui. C'est indiquer le système nerveux. Nancy. E. Bagneris, {A suivre). |
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