Histoire naturelle Aperçu sur la végétation du monde primitif
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APERÇU SUR LA VÉGÉTATION DU MONDE PRIMITIF.
Avec la formation du Keuper ou des marnes irisées, la physionomie de la surface terrestre a peu changé depuis le grès bigarré, quoiqu'il se fût soulevé des dépôts calcaires considérables formés par le Muschelkalk : c'était un pays plat et marécageux, dépourvu de montagnes et même de collines, et parsemé de grands lacs qui, en se desséchant, ont donné lieu aux dépôts de sel gemme exploités dans ce terrain. C'est dans les bas-fonds souvent envahis par les eaux et où régnait une atmosphère humide et chaude, que s'est développée la végétation du Keuper. Nous en retrouvons les traces surtout dans les grès qui. dans certaines localités et particulièrement aux environs de Stuttgart, forment la partie supérieure de ce terrain, et dans lesquels on a trouvé plus de soixante espèces caractéristiques. La famille dominante pendant toute la durée de celte période est encore celle des Equisétacées, dont un représentant, le Calamites arenaceus, formait à lui seul des forêts entières : c'était un arbre très gracieux, dont le tronc cannelé s'élevait jusqu'à une certaine hauteur sans pousser de rameaux, et portait à son sommet une large coupole de branches légères et retombantes, garnies de feuilles verticillées dans le genre de celles de la période houillère. Une jolie plante grimpante de la famille exotique des Smilacées, la Preisleria antiqua, établissait sur le tronc de ces arbres ses tiges à feuilles elliptiques, portées sur de longs pétioles, et dont les fruits formaient des grappes de petites baies. En outre, plusieurs fougères devaient peupler le sol de ces forêts; parmi les plus caractéristiques, je citerai : Lepidopteris Kurrii, Danoeopsis maranthacea, Pecopteris Stuttgartensis, etc. Mais ce qui caractérise plus particulièrement le grès du Keuper, c'est le développement d'une famille de dicotylédonées gymnospermes, voisine des conifères, et dont on a trouvé déjà quelques rares représentants dans le grès bigarré : c'est de la famille des cycadées que je veux parler. Ces plantes, qui se sont maintenues jusqu'à nos jours, sont caractérisées par leur tronc court et noueux qui rappelle les créations du monde primitif, tandis que leur touffe élégante de feuilles pennées annonce les palmiers des formations futures. La plupart des cycadées du Keuper ont été rapportées au genre Pterophyllum qui présente plusieurs espèces caractéristiques (Pterophyllum Jaegeri). Le terrain essentiellement marécageux présentait un caractère tout différent : deux types y dominent. Le premier est encore une Equisétacée du genre Equisetites. C'était une prèle gigantesque à gaines membraneuses, et dont la longue tige en colonne portait des fruits allongés et écailleux tout à fait semblables à ceux de nos prêles d'aujourd'hui (Equisetites columnaris). L'autre type, le Palaeoxyris, est une espèce de jonc qui devait atteindre la hauteur d'un homme et que l'on rencontre déjà dans le grès bigarré, quoique plus fréquemment dans le Keuper. § 4. La formation rhétique et le grès infra-liasique. Avant d'entrer dans la série des terrains jurassiques, il faut s'arrêter un moment sur une formation très intéressante qui a été rapportée par les géologues tantôt aux étages supérieurs du Trias, tantôt au Lias inférieur : c'est la formation rhétique qui se trouve particulièrement développée en Franconie, aux environs de Bamberg et surtout de Bayreuth, où elle renferme un très grand nombre de végétaux fossiles qui, dans certaines localités, ont donné lieu à des amas de charbon assez considérables pour être exploités. Les Gymnospermes, et notamment les Cycadées, paraissent en avoir formé le caractère distinctif. Cette famille, qui fit son apparition déjà avec la période houillère (Cordaïtes, Noeggerathia, Trigonocarpon, etc.), et qui s'est continuée pendant la période permienne, le grès bigarré et les marnes irisées, va atteindre le maximum de son développement avec l'époque jurassique et dominera seule avec les conifères pendant toute la durée de cette période. A côté du genre Pterophyllum qui caractérise le grès bigarré et le gré du Keuper (Pterophyllum Jaegeri), il faut placer le genre Zamites, particulièrement propre aux terrains jurassiques. L'espèce que l'on rencontre le plus fréquemment dans les couches rhétiques est l'Otozamites brevifolius. Parmi les conifères, il faut remarquer la Palyssia Braunii, qui appartient aux Cupressinées, et une Alrétacée, le Pinites microstachys. Les fougères de la formation rhétique appartiennent en grande partie aux ordres fossiles des Toenioptéridées et des Dictyoptéridées qui, jusqu'à présent, ne comptaient que peu de représentants. Elles sont très riches en genres et en espèces ; parmi les plus caractéristiques, je citerai : Angiopteridium, Miunsteri, Dictyophyllum acutilabrum , Sagenopteris rhoïfolia, Thaumatopteris Miunsteri, Clathropteris platyphylla et Camptopteris quercifolia. L'ordre des Sphénoptéridées nous offre cependant quelques espèces, moins fréquentes il est vrai (Sphenopteris Roessertiana, Coniopteris Braunii), et les Pécoptéridées comptent une des plus grandes et des plus belles fougères de cette formation, Pecopteris (Alethopteris) Roesserti. Le genre Nilssonia, rangé par M. Brongniart dans les Cycadées, y est resté jusque dans ces derniers temps, mais on a découvert depuis ses organes de fructification qui paraissent lui assigner sa véritable place parmi les fougères de l'ordre des Neuroptéridées . Deux Nilssonia, N. polymorpha et N. acuminata, sont caractéristiques pour la formation rhétique. Pour clore cet examen rapide des végétaux fossiles de la formation rhétique, il faut nommer encore une Equisétacée, Equisetum aliinsteri, et une Rhizocarpée de la famille des Marciléacées, Jeanpautia Miunsteriana. (A suivre.) P. K. |
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