Histoire naturelle Du vol chez les oiseaux
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DU VOL CHEZ LES OISEAUX.
Ainsi, l'acte du vol se compose de deux périodes bien distinctes, celle d'abaissement et celle de relèvement de l'aile. La première est seule active, car c'est alors que l'oiseau, par son coup d'aile descendant, s'appuie sur l'air et se lance dans l'espace ; la deuxième période, essentiellement passive, sert à rendre aux ailes la position initiale qui leur permet de s'abaisser de nouveau, et, comme nous l'avons vu, ce second mouvement a lieu dans les conditions les plus favorables pour que la vitesse de translation acquise soit le moins possible entravée. Mais comment l'oiseau se dirige-t-il dans son vol? comment fait-il pour s'élever verticalement, pour s'avancer en ligne horizontale ou oblique, puis encore pour se porter tantôt à droite, tantôt à gauche, suivant sa volonté ? Nous n'entrerons pas ici dans des développements bien scientifiques, nous ne parlerons pas du parallélogramme des forces, etc., ce qui ne rentrerait plus dans le cadre d'un petit résumé; mais ceux que le sujet intéresserait dans ses détails feraient bien de lire les remarquables travaux de M. Marey, qui ont été publiés dans la Revue des cours scientifiques. Nous nous contenterons donc de dire que la direction plus ou moins oblique du vol dépend presque entièrement de l'inclinaison (dans le sens de leur largeur) des ailes lorsqu'elles frappent l'air : quand l'oiseau voudra s'élever verticalement, il faudra qu'elles soient complètement horizontales. La longueur relative des rémiges influe beaucoup sur la facilité avec laquelle les oiseaux peuvent s'élever de cette façon dans un air calme ; ainsi, les plus aptes à ce genre de vol sont ceux dont les ailes sont tronquées au bout, comme par exemple les aigles, les éperviers ; ceux qui ont les rémiges longues et résistantes à leur extrémité ne peuvent s'élever qu'en zigzag ou en volant contre le vent. Pour s'avancer horizontalement, si l'on fait abstraction de la gravitation, l'oiseau devrait, en frappant l'air, tenir ses ailes verticalement ; mais n'oublions pas que la pesanteur tend à le faire descendre ; aussi le coup d'ailes, au lieu d'être donné avec une inclinaison verticale, devra être un peu oblique pour que la tendance à descendre soit neutralisée par ce mouvement légèrement ascensionnel. Quant à une direction intermédiaire entre les deux précédentes, elle s'obtiendra par une position intermédiaire des ailes. Il nous reste à voir comment fait l'oiseau pour diriger son vol à gauche ou à droite : c'est au moyen de sa queue, aussi bien que de ses ailes, qu'il obtient ces changements de direction : le fait se comparera très bien aux différents mouvements que le rameur est obligé d'exécuter pour se diriger sur l'eau : ainsi, les ailes de l'oiseau seront les rames, la queue le gouvernail. Que fera le rameur pour faire dévier sa barque dans le sens de la gauche, par exemple? Il donnera à sa rame droite des impulsions beaucoup plus énergiques qu'à l'autre, et, s'aidant encore du gouvernail qu'il inclinera de gauche à droite, il la fera immédiatement tourner dans le sens voulu. De même l'oiseau, suivant le côté où il veut se diriger, frappera l'air plus violemment de l'une de ses ailes en même temps qu'il déploiera et inclinera ses rectrices dans la direction favorable, faisant ainsi jouer à sa queue le rôle de gouvernail. Il ne faut pas négliger l'importance qu'a en général la queue pour l'oiseau : outre qu'elle aide à le diriger, elle lui est très utile dans le vol horizontal par le soutien qu'elle lui offre lorsqu'elle est déployée. Dans le planement c'est elle qui, par sa large surface jointe à celle des ailes, contribue beaucoup à soutenir certains oiseaux dans les airs, souvent assez longtemps, sans qu'ils paraissent faire le moindre mouvement. Pour qu'un oiseau soit un bon voilier, il devra joindre à une grande puissance de muscles des ailes très grandes par rapport au volume de son corps, cela est évident ; l'oiseau aux petites ailes, non seulement avancera moins vite, par ce fait que la surface de résistance de l'air est plus petite, mais encore il se fatiguera plus vite et se soutiendra moins longtemps dans les airs, parce que ses battements d'ailes devront être répétés bien plus souvent. Ainsi, nous avons le condor et la frégate, deux exemples par excellence d'un vol puissant. Le premier ne mesure pas moins de quatre mètres d'envergure : il choisit ordinairement sa demeure à une élévation de trois à cinq mille mètres ; il n'est pas rare de le voir planer à des hauteurs de plus de sept mille mètres au-dessus du niveau de la mer, et de là s'abattre dans la plaine sur quelque troupeau de moutons, dont il emportera l'un dans ses serres jusqu'à sa retraite inaccessible. Quant aux frégates, elles ont le vol si puissant qu'elles peuvent s'éloigner de terre à des distances de plus de quatre cents lieues; leurs ailes, relativement à leur taille, sont encore plus longues que celles du condor. Les mouettes, au dire de Hans Sloane, à la Barbade, vont en troupes à plus de deux cents milles de distance et reviennent le même jour. Buffon nous parle du faucon du roi Henri II qui, s'étant emporté après une canepetière à Fontainebleau, fut pris le lendemain à Malte, et reconnu à l'anneau qu'il portait ; du faucon des Canaries, envoyé au duc de Lorme, qui revint d'Andalousie à l'île de Ténériffe en seize heures, ce qui fait un trajet de deux cent cinquante lieues. G. Weiss. |
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